Prendre soin des
paroles effacées
EXTRAIT
«Les tenant·es de la conception anale de l’espace public reprochent deux choses aux militant·es. Premièrement, de détourner l’espace public de sa fonction habituelle, c’est-à-dire de rompre la division magique opérée par la pensée libérale entre diverses sphères d’activités (privée et publique, juridique et politique, etc.). Ce serait la faute commise par [Julie] Snyder et [Pénélope] McQuade, qui ont rompu la division entre le privé et le public en racontant, dans l’espace médiatique, une histoire soi-disant “personnelle” et qui ne serait autorisée à devenir publique qu’en entrant dans le circuit étanche de la police et des tribunaux. Deuxièmement, de chercher à “se faire justice soi-même” ou plutôt, selon notre analyse, de contester la négation du droit de certains êtres humains à être reconnus comme sujets à part entière, les institutions donnant peu de poids à leur parole. En réalité, ces deux reproches en sont un seul et même: celui de remodeler la cartographie libérale, d’en repousser les barrières, pour forcer l’accès à des espaces qui ont été historiquement pensés et réglementés au profit d’une minorité.»